Arrêt du Tribunal fédéral 2C_643/2016 du 1er septembre 2017

Carte de paiement comme moyen d'identification

  • 30. Januar 2018
  • Bearbeitet durch: Susanne Raas
  • Beitragsart: Grundsatzurteil
  • Rechtsgebiete: Internationale Amtshilfe
  • Zitiervorschlag: Susanne Raas, Arrêt du Tribunal fédéral 2C_643/2016 du 1er septembre 2017, ASA online Grundsatzurteile
Arrêt du Tribunal fédéral 2C_643/2016 du 1er septembre 2017 en la cause Administration fédérale des contributions contre X. Question juridique de principe.

Contenu

  • 1. Regeste
  • 2. Faits (résumé)
  • 3. Extrait des considérants

1.

Regeste ^

Les dispositions régissant l’assistance administrative sont, par nature, procédurales. Les conventions de double imposition prévoient des règles fixant les exigences matérielles de cette procédure, tandis que le droit interne concrétise l’exécution de la procédure en Suisse (consid. 4.3).
Une demande d’assistance administrative, dans laquelle plusieurs personnes visées sont identifiées au moyen d’une carte de paiement, ne constitue pas une demande groupée. Dans la mesure où la demande litigieuse ne mentionne ni le nom ni l’adresse des personnes visées et que la possibilité d’accorder l’assistance dans une telle situation dépend d’abord de l’existence d’un accord le prévoyant spécifiquement, la distinction entre une demande groupée et une demande (collective) – identifiant des personnes autrement que par le nom et l’adresse – paraît ténue. En conséquence, il se justifie de recourir aux critères développés par le Tribunal fédéral en lien avec les demandes groupées pour déterminer si la demande d’assistance litigieuse constitue, ou non, une pêche aux renseignements prohibée (consid. 4.4, 5.1 s. et 5.4).
Le disposizioni che disciplinano lassistenza amministrativa sono, per natura, procedurali. Le convenzioni per evitare le doppie imposizioni prevedono delle regole che fissano le esigenze materiali di questa procedura, mentre il diritto interno concretizza lesecuzione della procedura in Svizzera (consid. 4.3).
Una domanda di assistenza amministrativa, nella quale più persone interessate sono identificate per mezzo di una carta di credito, non costituisce una domanda raggruppata. Nella misura in cui la domanda litigiosa non menziona né il nome né l
indirizzo delle persone interessate e che la possibilità di accordare lassistenza in una tale situazione dipende dapprima dallesistenza di un accordo che lo preveda concretamente, la distinzione tra una domanda raggruppata e una domanda (collettiva) – identificante delle persone in altro modo che attraverso il nome e lindirizzo – appare minima. Di conseguenza, è giustificato ricorrere ai criteri sviluppati dal Tribunale federale in rapporto alle domande raggruppate per determinare se la domanda di assistenza litigiosa costituisce o meno una «fishing expedition» proibita (consid. 4.4, 5.1 seg. e 5.4).

Die Bestimmungen, die die Amtshilfe regeln, sind verfahrensrechtlicher Natur. Die Doppelbestimmungsabkommen stellen Regeln auf, welche die materiellen Anforderungen an dieses Verfahren regeln, während das innerstaatliche Recht die Durchführung des Verfahrens in der Schweiz konkretisiert (E. 4.3).
Ein Amtshilfeersuchen, in dem mehrere davon betroffene Personen mittels einer Kreditkarte identifiziert werden, ist kein Gruppenersuchen. Unter dem Gesichtspunkt, dass das streitbetroffene Ersuchen weder die Namen noch die Adressen der betroffenen Personen nennt und dass die Möglichkeit, in einer solchen Situation Amtshilfe zu leisten, vom Vorliegen eines Vertrages, der dies konkret vorsieht, abhängt, erscheint der Unterschied zwischen einem Gruppenersuchen und einer (Kollektiv)Anfrage, in der die Personen auf andere Weise als mittels Namen und Adresse identifiziert werden, sehr klein. Es rechtfertigt sich daher, auf jene Kriterien zurückzugreifen, die das Bundesgericht im Zusammenhang mit Gruppenersuchen entwickelt hat, um festzustellen, ob es sich beim streitbetroffenen Amtshilfeersuchen um eine verbotene
«fishing expedition» handelt oder nicht (E. 4.4, 5.1 f. und 5.4).

2.

Faits (résumé) ^

Le 18 mars 2014, l’Office central des affaires fiscales étrangères de l’Administration fiscale norvégienne (ci-après : l’autorité requérante) a adressé à l’Administration fédérale des contributions (ci-après : l’Administration fédérale) une demande d’assistance administrative internationale contenant les numéros de neuf cartes de paiement (« payment cards ») dont les titulaires étaient inconnus.
Le fisc norvégien avait obtenu des informations sur les transactions réalisées sur le territoire norvégien au moyen de cartes de crédit étrangères, comprenant les numéros des cartes ainsi que l’identité de l’émetteur de cartes ou de la banque. Lorsque les cartes étaient utilisées dans des automates ATM ou que leur utilisation exigeait la fourniture d’un code PIN, le fisc norvégien ne pouvait découvrir l’identité de leurs titulaires. Or, dans la mesure où les cartes avaient été utilisées dans une même région du pays sur une longue période, il était probable que ces titulaires étaient ou devaient être des résidents fiscaux norvégiens dont on pouvait soupçonner qu’ils n’avaient pas rempli leurs obligations fiscales de manière complète. Après avoir indiqué que toutes les sources possibles de renseignements en Norvège avaient été épuisées, l’autorité requérante demandait l’assistance administrative de la Suisse pour obtenir l’identité des titulaires des neuf cartes de paiement listées en annexe à la demande, celle des éventuels ayants droit du compte lié à chaque carte, ainsi que les relevés bancaires des comptes pour la période du 1er janvier 2011 au 28 février 2014. La demande contenait en annexe le nom des trois entités émettrices des cartes, toutes établies en Suisse, dont Y. (ci-après : la Société).
Pour chacune des neuf cartes de paiement figurant dans la demande, l’autorité requérante a notamment spécifié la date à laquelle la carte avait été utilisée pour la dernière fois en Norvège et il en ressort que la date la plus récente est le 31 décembre 2013 (art. 105 al. 2 LTF [loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, RS 173.110]).
Après avoir obtenu les informations concernant un compte au nom de X. de la Société et de la banque, l’Administration fédérale a informé X. le 11 février 2015 de la teneur des informations qu’elle entendait communiquer à l’autorité requérante. Le 18 mars 2015, l’intéressée a indiqué qu’elle s’opposait à toute transmission d’informations la concernant.
Par décision finale du 1er juin 2015, l’Administration fédérale a accordé l’assistance administrative à la Norvège et décidé de transmettre à l’autorité requérante certaines informations.
X. a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral.
Par arrêt du 27 juin 2016, le Tribunal administratif fédéral a admis le recours. En substance, il a jugé que la demande d’assistance du 18 mars 2014 devait être rejetée, car elle n’identifiait pas les personnes qu’elle visait au moyen de leur nom et de leur adresse.
A l’encontre de l’arrêt du 27 juin 2016, l’Administration fédérale interjette un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral.
La IIe Cour de droit public a délibéré sur le présent recours en séance publique le 1er septembre 2017 et a admis le recours.

3.

Extrait des considérants ^

[L’art. 26 de la Convention du 7 septembre 1987 entre la Confédération suisse et le Royaume de Norvège en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune dans sa version découlant de l’art. V du protocole signé le 31 août 2009 (RO 2011 197 ; CDI CH-NO), en combinaison avec l’échange de lettre intervenu à la même date entre le Conseil fédéral et le Gouvernement norvégien, l’échange de lettre intervenu les 15 mai/13 juin 2012 entre ces mêmes autorités et l’arrêté fédéral du 23 décembre 2011 permit l’identification d’une personne visée par une demande d’assistance administrative par d’autres moyens que le nom et l’adresse.]
4.3. Il convient encore de préciser que l’Échange de lettres 2012 s’applique à la demande d’assistance litigieuse, puisque celle-ci a été formée le 18 mars 2014, soit après l’entrée en vigueur de cet acte, et ce même si ladite demande tend à l’obtention de renseignements portant sur la période allant du 1er janvier 2011 au 28 février 2014.
En effet, les dispositions qui régissent l’assistance administrative, par exemple celles qui prévoient le contenu de la demande, sont par nature procédurale. Les conventions de double imposition posent des règles qui fixent les exigences matérielles de cette procédure, alors que le droit interne sert à en concrétiser l’exécution en Suisse. C’est en ce sens qu’il faut comprendre la formulation utilisée par la jurisprudence selon laquelle la LAAF [loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l’assistance administrative internationale en matière fiscale ; RS 651.1] a le caractère de loi d’exécution de nature procédurale (cf. ATF 143 II 224 consid. 6.1 p. 228 ; 143 II 136 consid. 4.1–4.4 p. 142 ss ; 139 II 404 consid. 1.1 p. 408 ; arrêt 2C_792/2016 du 23 août 2017 consid. 2.2 non destiné à la publication). Il n’en demeure pas moins que, tant la LAAF que les dispositions régissant l’assistance administrative qui figurent dans les CDI fixent des règles de procédure qui partant, sauf disposition contraire, sont d’application immédiate (cf. ATF 123 II 134 consid. 5b/bb p. 139 ; 112 Ib 576 consid. 2 p. 584 et les références ; arrêts 2A.185/2003 du 27 janvier 2004 consid. 2, traduit in RDAF 2004 II 10 ; 2A.250/2001 du 6 février 2002 consid. 3, in Pra 2002 52 283), peu importe que les périodes fiscales visées par les demandes soient antérieures à l’entrée en vigueur des règles de procédure.
A cet égard, il ne faut pas confondre l’applicabilité immédiate des règles procédurales régissant la demande d’assistance administrative fixées dans une CDI, avec la question des périodes fiscales visées par ladite demande. Les règles de procédure nouvelles de la CDI s’appliquent aussi lorsque les demandes portent sur des périodes fiscales antérieures à leur entrée en vigueur (arrêts 2A.185/2003 du 24 janvier 2004 consid. 2, traduit in RDAF 2004 II 10 ; 2A.233/2003 du 22 décembre 2003 consid. 1, in RF 59/2004 p. 475, traduit in RDAF 2004 II 1 ; 2A.551/2001 du 12 avril 2002 consid. 2, traduit in RDAF 2002 II 303 ; 2A.250/2001 du 6 février 2002 consid. 3, in StE 2002 A 31.4 Nr. 6 ; cf. aussi arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme GSB c. Suisse du 22 décembre 2015, requête n° 28601/11, § 39 et 78). Les Etats peuvent toutefois prévoir des limites aux périodes fiscales susceptibles d’être visées et il est fréquemment stipulé dans les CDI les périodes fiscales à partir desquelles les demandes d’assistance peuvent porter (cf. Daniel Holenstein, in : Martin Zweifel/Michael Beusch/René Matteotti [éds.], Internationales Steuerrecht, Kommentar zum Schweizerischen Steuerrecht, 2015, n° 213 ad art. 26 OECD MA). C’est ce qu’a fait la Suisse, qui a inclus dans les CDI postérieures à 2009 une clause fixant la limite à l’année qui suit l’entrée en vigueur de la CDI en question (Xavier Oberson, in : Commentaire Modèle OCDE, 2014, n° 73 ad art. 26 MC OCDE). En l’occurrence, c’est ce qui a été fait entre la Suisse et la Norvège, dès lors qu’il est prévu que l’échange de renseignements selon l’art. 26 CDI CH-NO s’applique, conformément à l’art. VII ch. 2 let. c du Protocole 2009, aux renseignements concernant les années fiscales commençant le 1er janvier 2011. Cette règle n’a pas été modifiée lorsque les Etats contractants ont décidé de permettre désormais l’identification des personnes par d’autres moyens que le nom ou l’adresse. Il en découle que l’Échange de lettres 2012 entre en ligne de compte pour examiner la transmissibilité de l’ensemble des renseignements requis dans la demande d’assistance administrative litigieuse, qui concernent la période allant du 1er janvier 2011 au 28 février 2014.
4.4. Encore faut-il se demander si la demande d’assistance litigieuse est conforme aux exigences fixées dans l’Echange de lettre 2012. Celle-ci fournit le numéro de neuf cartes de crédit et l’identité des entités émettrices des cartes, toutes établies en Suisse. Par ces éléments, l’autorité requérante a identifié les contribuables qu’elle visait, par d’autres moyens que le nom et l’adresse, de manière conforme au ch. 2 let. a de l’Échange de lettres 2012. Le fait que la demande concerne plusieurs personnes n’est pas problématique, la jurisprudence ayant déjà admis qu’une demande d’assistance administrative pouvait viser collectivement plusieurs contribuables (cf. arrêt 2C_893/2015 du 16 février 2017 consid. 12.1 non publié in ATF 143 II 202 mais in StE 2017 A 31.2 Nr. 14 et in RDAF 2017 II 336). 
Si la demande norvégienne mentionne le nom des entités suisses émettrices des cartes de crédit, elle ne fournit pas le nom et l’adresse du détenteur présumé des renseignements. Cette information n’est toutefois pas requise selon le ch. 2 let. b de l’Échange de lettres 2012. Il apparaît par ailleurs que la demande d’assistance administrative a été formée dans le respect du principe de la subsidiarité prévu au ch. 1 de l’Échange de lettres 2009, dès lors qu’il n’y a aucune raison de remettre en cause les explications de l’autorité requérante sur ce point (cf. arrêt 2C_904/2015 du 8 décembre 2016 consid. 7.2). L’intimée ne soutient du reste pas le contraire. Les renseignements destinés à être transmis remplissent – et l’intimée ne le conteste pas non plus – la condition de la pertinence vraisemblable, s’agissant de résidents fiscaux norvégiens présumés (art. 26 par. 1 CDI CH-NO ; sur le caractère transmissible d’informations sur l’identité des ayants droit économiques et des relevés bancaires, cf. au surplus ATF 142 II 161 consid. 4.6.2 p. 181 ; arrêt 2C_963/2014 du 24 septembre 2015 consid. 6 non publié in ATF 141 II 436 mais in Archives 84 p. 559 et traduit in RDAF 2016 II 374 ; arrêt 2C_527/2015 du 3 juin 2016 consid. 5.2). Enfin, l’intimée ne conteste pas non plus que l’autorité requérante a fourni les informations requises par le ch. 3 let. b à d de l’Échange de lettres 2009, à savoir qu’elle a précisé la période fiscale visée et qu’elle a décrit les renseignements requis ainsi que l’objectif fiscal fondant la demande. Il s’ensuit que la demande d’assistance administrative litigieuse visant l’intimée remplit toutes les conditions formelles et matérielles requises.
5.
Il reste à déterminer si, comme le soutient l’intimée, l’assistance doit néanmoins être refusée au motif que la demande constitue une pêche aux renseignements inadmissible, car elle serait formulée de manière trop abstraite et impersonnelle. 
5.1. L’Échange de lettres 2012 réserve l’existence d’une pêche aux renseignements, sans définir cette notion, qu’il convient donc de circonscrire dans le contexte spécifique du cas d’espèce.
La question de la pêche aux renseignements a été examinée dans l’arrêt publié sous ATF 143 II 136, rendu dans le contexte d’une demande d’assistance administrative visant toutes les personnes physiques, inconnues des autorités fiscales de l’Etat requérant, qui étaient titulaires d’un compte auprès d’une banque suisse et qui n’avaient pas fourni à cette dernière la preuve de leur conformité fiscale dans l’Etat requérant. Cette demande, qui concernait ainsi un nombre indéterminé de personnes, identifiables au moyen d’un comportement décrit par l’Etat requérant, a été qualifiée de demande groupée et non pas de pêche aux renseignements inadmissible.
L’on ne se trouve certes pas dans le cas d’une demande groupée en l’espèce, puisque la demande d’assistance administrative norvégienne vise un nombre déterminé de personnes, identifiées au moyen de leur numéro de carte de crédit, ce qui relève davantage d’une demande collective (cf. consid. 4.4 ci-dessus). Il n’en demeure pas moins que, comme dans une demande groupée, la demande litigieuse ne fournit ni le nom ni l’adresse des personnes qu’elle vise, et que la possibilité d’accorder l’assistance administrative dans une telle situation dépend d’abord de l’existence d’un accord qui le prévoit spécifiquement (par exemple, l’accord amiable du 31 octobre 2011 dans le cas de la CDI conclue avec le Pays-Bas [RO 2012 4079] dans le contexte de l’ATF 143 II 136, et l’Échange de lettres 2012 dans le cas d’espèce). Sous cet angle, la distinction entre demande groupée et demande (collective) identifiant des personnes autrement que par le nom et l’adresse apparaît ténue. Dans ces circonstances, il se justifie, par souci de cohérence, de recourir aux critères que le Tribunal fédéral a développés dans l’ATF 143 II 136 pour déterminer si la demande d’assistance litigieuse constitue ou non une pêche aux renseignements prohibée.
5.2. Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a retenu, après avoir reproduit de larges passages relevants du Commentaire OCDE du MC OCDE dans sa version du 12 juillet 2012, qu’une demande d’assistance administrative doit remplir trois conditions pour constituer une demande groupée admissible. Premièrement, elle doit fournir une description détaillée du groupe, qui expose les faits et les circonstances spécifiques ayant conduit à la formulation de la demande. Deuxièmement, elle doit exposer le droit fiscal applicable ainsi que les motifs permettant de supposer que les contribuables du groupe n’auraient pas rempli leurs obligations fiscales. Troisièmement, elle doit démontrer que les renseignements demandés sont propres à faire en sorte que ces obligations soient remplies (cf. consid. 6.1.2 p. 154 ss).

L’arrêt reproduit aussi l’exemple 8.f figurant dans le Commentaire OCDE, qui est relevant pour l’examen du cas d’espèce (cf. consid. 6.1.2 p. 155) :

 

« 8. f) L’Etat A a obtenu des renseignements sur toutes les transactions impliquant des cartes de crédit étrangères qui ont été réalisées sur son territoire durant une certaine année. L’Etat A a traité les données et lancé une enquête qui a identifié tous les numéros de cartes de crédit par rapport auxquels la fréquence et la configuration des transactions et le type d’utilisation au cours de cette année suggèrent que les titulaires étaient des résidents fiscaux de l’Etat A. L’Etat A ne peut obtenir les noms de ces personnes par le biais des sources habituelles de renseignements prévues par sa procédure fiscale interne, les informations pertinentes n’étant pas en possession ou sous le contrôle de personnes se trouvant dans sa juridiction. Les numéros de cartes de crédit identifient l’un des émetteurs de ces cartes comme étant la Banque B située dans l’Etat B. En se basant sur une investigation ou enquête en cours, l’Etat A envoie une demande de renseignements à l’Etat B, demandant le nom, l’adresse et la date de naissance des titulaires des cartes spécifiques identifiées durant son enquête et de toute autre personne ayant un pouvoir de signature sur ces cartes. L’Etat A fournit les numéros des cartes bancaires spécifiques concernées ainsi que les informations précisées ci-dessus afin de démontrer la pertinence vraisemblable des renseignements demandés pour son enquête et, plus généralement, pour l’administration et l’application de sa législation fiscale. »

5.3. L’ATF 143 II 136 retient en outre que l’art. 2 al. 1 de l’Ordonnance administrative internationale en matière fiscale dans sa version du 20 août 2014 (aOAAF ; RO 2014 2753, correspondant à l’actuel art. 3 al. 1 OAAF qui l’a remplacée à partir du 1er janvier 2017 [RS 651.11]) est applicable, dans la mesure où il concrétise les règles de droit international relative aux demandes groupées (cf. ATF 143 II 136 consid. 6.2 p. 157 s.). Selon cette disposition, une demande groupée doit contenir les informations suivantes :

 

« a. une description détaillée du groupe faisant l’objet de la demande ainsi que des faits et circonstances à l’origine de la demande ;
b. une description des renseignements demandés et l’indication de la forme sous laquelle l’Etat requérant souhaite les recevoir ;
c. le but fiscal en vue duquel ces renseignements sont demandés ;
d. les raisons qui donnent à penser que les renseignements demandés sont détenus dans l’Etat requis ou sont en la possession ou sous le contrôle d’un détenteur des renseignements résidant dans cet Etat ;
e. le nom et l’adresse du détenteur supposé des renseignements, dans la mesure où ils sont connus ;
f. un commentaire du droit applicable ;
g. une justification claire et fondée sur des faits de l’hypothèse selon laquelle les contribuables du groupe visé par la demande n’ont pas respecté le droit applicable ;
h. une explication démontrant que les renseignements demandés aideraient à déterminer si le comportement des contribuables du groupe est conforme au droit ;
i. dans la mesure où le détenteur des renseignements ou un autre tiers ont soutenu activement le comportement non conforme au droit des contribuables du groupe, une présentation du soutien apporté ;
j. la déclaration selon laquelle la demande est conforme aux dispositions législatives et réglementaires ainsi qu’aux pratiques administratives de l’Etat requérant, de sorte que, si les renseignements demandés relevaient de la compétence de l’Etat requérant, l’autorité requérante pourrait les obtenir en vertu de son droit ou dans le cadre normal de ses pratiques administratives ;
k. la déclaration précisant que l’Etat requérant a utilisé tous les moyens disponibles en vertu de sa procédure fiscale nationale. »
5.4. En l’occurrence, il faut en premier lieu constater que la demande remplit les trois conditions énoncées par le Tribunal fédéral dans l’ATF 143 II 136.
D’abord, l’autorité requérante fournit une description détaillée du groupe qu’elle vise et expose les faits et les circonstances spécifiques qui ont conduit à la formulation de la demande (première condition). En effet, elle explique avoir obtenu, au terme d’une enquête, des informations sur des transactions impliquant des cartes de crédit étrangères réalisées sur territoire norvégien. Si elle ne connaissait pas le nom des titulaires des cartes, elle connaissait en revanche le numéro desdites cartes, ainsi que l’identité des entités suisses émettrices, reproduites en annexe à la demande. L’autorité requérante expose ensuite qu’elle a réussi à identifier certains titulaires de cartes grâce aux transactions qu’ils avaient effectuées sur internet et qui requéraient une identification ; lorsqu’en revanche la carte était utilisée dans des automates ATM ou que son utilisation requérait la fourniture d’un code PIN, cette identification n’était pas possible. S’agissant ensuite de la deuxième condition, l’autorité requérante précise que la demande d’assistance concerne des cartes de crédit suisses qui ont été utilisées pour des transactions portant sur de gros montants, dans une même région du pays et sur une longue période, ce qui laissait supposer que leurs titulaires étaient des résidents fiscaux norvégiens qui n’avaient pas rempli leurs obligations fiscales de manière complète. Si elle n’expose pas précisément le droit fiscal applicable (en indiquant par exemple les dispositions du droit fiscal norvégien qui entrent en ligne de compte), il ressort clairement de la demande que les résidents fiscaux norvégiens doivent reporter dans leur déclaration fiscale l’ensemble de leurs revenus et de leur fortune à l’étranger (« to make sure that Norvegian taxpayers pay correct taxes for their income and fortune abroad »). Une telle mention est suffisante pour que l’on comprenne que le droit fiscal norvégien impose aux contribuables qui sont assujettis de manière illimitée à l’impôt doivent reporter l’ensemble de leurs revenus et de leur fortune mondiaux dans leur déclaration fiscale. Enfin, la demande d’assistance norvégienne laisse percevoir de manière suffisamment claire que les renseignements demandés, qui visent à obtenir le nom et l’adresse des titulaires des cartes et/ou des bénéficiaires économiques, ainsi que les relevés de comptes, sont propres à compléter, le cas échéant, l’assiette de l’impôt de ces contribuables. La troisième condition est partant également remplie.
A cela s’ajoute que l’état de fait présenté dans la demande est très similaire à celui qui figure dans l’exemple de demande groupée admissible présenté sous chiffre 8f du Commentaire OCDE, ce qui plaide également en faveur d’une demande collective admissible, et que la demande d’assistance administrative contient les éléments prévus à l’art. 2 al. 1 aOAAF. 
5.5. C’est donc à tort que l’intimée soutient que la demande litigieuse équivalait à une pêche aux renseignements. Son grief est partant rejeté.