Arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2480/2017 du 11 mars 2019

Solidarité du propriétaire des véhicules aux côtés du détenteur.

  • 14 agosto 2019
  • Trattato da: Lysandre Papadopoulos
  • Categoria di articoli: Sentenza di principio
  • Campo del diritto: Altre contributi della federazione
  • Citazione: Lysandre Papadopoulos, Arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2480/2017 du 11 mars 2019 , ASA Online: Sentenza di principio
Arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2480/2017 du 11 mars 2019 en la cause Administration fédérale des douanes contre A.

Inhalt

  • 1. Regeste
  • 2. Faits (résumé)
  • 3. Extrait des considérants

1.

Regeste ^

Outre le détenteur du véhicule, sont solidairement responsables de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations, sous réserve des art. 36a et 36b ORPL, le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d’un véhicule tracteur, respectivement d’une remorque, lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu’il a été mis en demeure sans effet (extension de responsabilité réglementée au niveau de l’ordonnance [art. 36 al. 1bis ORPL], jugée conforme à la loi et la constitution [rappel de jurisprudence] ; consid. 2.2).

La solidarité du propriétaire du véhicule n’apparaît pas seulement au moment où le détenteur du véhicule, débiteur principal de la redevance, devient insolvable. La qualité de débiteur solidaire naît en même temps que celle du débiteur principal. Il ne faut pas confondre la naissance de la créance fiscale et son exigibilité : la créance d’impôt naît ex lege sitôt que les faits générateurs prévus par la loi sont réalisés, sans aucune autre intervention extérieure. La taxation n’a aucun effet constitutif et n’est pas une condition de l’existence de la créance d’impôt (consid. 3.3).

Neben dem Fahrzeughalter sind für die leistungsabhängige Schwerverkehrsabgabe unter Vorbehalt der Art. 36a und 36b SVAV der Eigentümer, der Vermieter oder der Leasinggeber eines Zugfahrzeugs oder eines Anhängers solidarisch haftbar, wenn der Halter zahlungsunfähig ist oder erfolglos gemahnt wurde (Ausweitung der auf Verordnungsstufe geregelten Haftung [Art. 36 Abs. 1bis SVAV], wobei diese als mit Gesetz und Verfassung in Einklang stehend beurteilt wurde [Wiedergabe der Rechtsprechung]; E. 2.2).

Die Solidarhaftung des Fahrzeugeigentümers besteht nicht erst ab dem Moment, in dem der Fahrzeughalter, der Hauptschuldner der Abgabe, zahlungsunfähig wird. Die Eigenschaft als Solidarschuldner entsteht gleichzeitig mit jener des Hauptschuldners. Die Entstehung der Abgabeforderung und ihre Fälligkeit sind nicht zu verwechseln: Die Steuerforderung entsteht von Gesetzes wegen, sobald sich die im Gesetz vorgesehenen massgeblichen Tatsachen verwirklicht haben, ohne weitere äussere Einwirkung. Die Besteuerung hat keine konstitutive Wirkung und ist keine Voraussetzung für das Bestehen der Steuerforderung (E. 3.3).

2.

Faits (résumé) ^

La société A._______ SA a pour administrateur unique B._______. La société C._______ SA (en liquidation) (ci-après : l’assujettie) a également pour administrateur unique B._______. Par décision du Tribunal [régional] du 15 mai 2017, la société a été déclarée en faillite avec effet à partir du 15 mai 2017, à 11h30.

Le 18 mars 2015, A._______ SA acquit dans la faillite de la société D._______ Sàrl, un lot de matériel comprenant, entre autres, des camions et des remorques. Le 26 mars 2015, A._______ SA demanda au Service cantonal des automobiles l’apposition de la remarque « changement de détenteur interdit » (code 178) dans le permis de circulation des véhicules (tracteurs et semi-remorques) immatriculés au nom de l’assujettie. Le 2 juin 2015, A._______ SA et l’assujettie conclurent un contrat en vertu duquel la première cédait la jouissance et l’usage d’un lot comprenant notamment des camions, remorques et semi-remorques en contrepartie d’une redevance de la seconde. Dit contrat portait sur la période allant du 1er mars 2015 au 28 février 2017.

Selon ses dires, A._______ SA mit un terme au contrat de location et procéda, le 8 novembre 2016, à la vente de l’ensemble du matériel loué à une personne dont le nom n’a pas été dévoilé devant la Cour de céans.

Les 25 et 30 novembre 2016 ainsi que le 3 janvier 2017, la Direction générale des douanes (ci-après : « DGD » ou « autorité inférieure ») établit les décisions de taxation relatives à la redevance sur le trafic des poids lourds (ci-après : « RPLP » ou « redevance ») pour les périodes fiscales d’août à octobre 2016 pour les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie.

Les factures restant impayées, l’autorité inférieure informa A._______ SA qu’elle la considérait être propriétaire des véhicules immatriculées au nom de l’assujettie et par conséquent solidairement responsable du paiement de la redevance. Ce courrier resta sans suite. Par décision du 14 mars 2017, l’autorité inférieure rendit à l’encontre de A._______ SA, une décision de responsabilité solidaire concernant les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie et relative aux périodes fiscales d’août à octobre 2016. La redevance RPLP et l’intérêt de retard dus pour la période fiscale allant d’août à octobre 2016 s’élevaient à Fr. 89’645.15 au jour de la décision.

Par recours du 21 avril 2017, A._______ SA (ci-après : la recourante) sollicite essentiellement l’annulation de la décision du 14 mars 2017 et la constation par la Cour de céans qu’elle n’est pas solidairement responsable du paiement de la RPLP due par l’assujettie pour les périodes fiscales faisant l’objet de la décision entreprise. L’autorité inférieure a conclu au rejet du recours par réponse du 26 juin 2017.

3.

Extrait des considérants ^

[…]

2.

2.1 Selon l’art. 1 de la loi fédérale du 19 décembre 1997 concernant une redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (LRPL, RS 641.81), la redevance doit assurer la couverture à long terme des coûts d’infrastructure et des coûts occasionnés à la collectivité par ce trafic, dans la mesure où celui-ci ne compense pas ces coûts par d’autres prestations ou redevances (al. 1) ; la redevance doit par ailleurs contribuer à améliorer les conditions-cadre du chemin de fer sur le marché des transports et à acheminer davantage de marchandises par le rail (al. 2). La redevance a pour objet l’utilisation de la voie publique par les poids lourds et les remorques en Suisse et à l’étranger pour le transport de marchandises et de voyageurs (cf. art. 2 et 3 LRPL). Conformément à l’art. 6 al. 1 et 3 LRPL, la redevance est calculée sur la base du poids total autorisé du véhicule et du kilométrage mais elle peut en outre être perçue en fonction des émissions produites ou de la consommation (cf. ATAF 2013/26 consid. 2.1 et arrêts du TAF A-6851/2015 du 1er novembre 2016 consid. 2.1, A-4961/2013 du 30 janvier 2014 consid. 3.1).

2.2 S’agissant des véhicules suisses, l’assujetti est le détenteur du véhicule. En revanche, en ce qui concerne les véhicules étrangers, le conducteur est également assujetti (cf. art. 5 al. 1 LRPL). Conformément à l’art. 5 al. 2 LRPL, le Conseil fédéral peut déclarer d’autres personnes solidairement responsables. Ce dernier a fait usage de cette compétence aux articles 36 et suivants de l’ordonnance du 6 mars 2000 concernant une redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (Ordonnance relative à une redevance sur le trafic des poids lourds, ORPL, RS 641.811). En effet, l’art. 36 al. 1bis ORPL prévoit que :

« Outre le détenteur, sont solidairement responsables de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations et des intérêts et émoluments éventuels, sous réserve des art. 36a et 36b:
  1. le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d’un véhicule tracteur, lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu’il a été mis en demeure sans effet : compte tenu du poids total du véhicule tracteur pour les kilomètres parcourus avec ce dernier ;
  2. le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d’une remorque, lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu’il a été mis en demeure sans effet : compte tenu du poids total de la remorque pour les kilomètres parcourus avec cette dernière.».

D’après la jurisprudence du Tribunal fédéral, cette extension de responsabilité, réglementée au niveau de l’ordonnance, a été jugée conforme à la loi et la constitution, en particulier au principe de la légalité (voir arrêt du TF 2C_641/2007 du 25 avril 2008 consid. 3.3 ; ATAF 2013/26 consid. 2,2 ; arrêts du TAF A-6851/2015 du 1er novembre 2016 consid. 2.2.1, A-4961/2013 du 30 janvier 2014 consid. 3.2).

2.3 Afin de limiter le risque de responsabilité solidaire, les art. 36a et 36b de cette même ordonnance mettent à disposition de la personne solidairement responsable au sens de l’art. 36 al. 1bis ORPL une procédure en deux étapes.

«Art. 36a Demande à l’AFD
  1. La personne solidairement responsable au sens de l’art. 36, al. 1bis, qui désire remettre un véhicule tracteur ou une remorque (véhicule) à un tiers pour utilisation peut, dans le cadre de la conclusion du contrat, demander à l’AFD si le tiers (partie contractante), ou le détenteur du véhicule s’il ne s’agit pas de la même personne, est insolvable ou a été mis en demeure sans effet.
  2. La demande doit comporter :
    1. l’identité et l’adresse de la partie contractante ainsi que, le cas échéant, du détenteur ;
    2. les indications relatives au véhicule ; et
    3. une déclaration écrite de la partie contractante et, le cas échéant, du détenteur autorisant l’AFD à donner les renseignements demandés.
  3. Si la partie contractante ou, le cas échéant, le détenteur est insolvable ou a été mis en demeure sans effet, l’AFD, dans sa réponse, attire l’attention du requérant sur le fait que celui-ci, du fait de la conclusion du contrat et pour le véhicule concerné, devient solidairement responsable du paiement des redevances dues à partir de ce moment ainsi que des intérêts et émoluments éventuels.

Art. 36b Communication ultérieure de l’AFD

 

Si l’AFD constate, après la mise en circulation du véhicule visé à l’art. 36a, al. 2, let. b, que le détenteur est insolvable ou a été mis en demeure sans effet et qu’elle envisage d’actionner la personne solidairement responsable au sens de l’art. 36, al. 1bis, elle informe cette personne par écrit que celle-ci est solidairement responsable du paiement des redevances futures ainsi que des intérêts et émoluments éventuels concernant ce véhicule :

  1. si elle ne résilie pas le contrat dans un délai de 60 jours ; ou
  2. si toutes les redevances dues pour ce véhicule ainsi que les intérêts et émoluments éventuels ne sont pas payés intégralement dans les 60 jours ».

2.4 S’agissant de véhicules suisses, l’obligation fiscale naît le jour de l’admission du véhicule à la circulation. Celle-ci s’éteint le jour où les plaques d’immatriculation sont restituées ou le permis de circulation annulé. En revanche, l’obligation fiscale relative aux véhicules étrangers naît lors de leur entrée sur le territoire suisse et s’éteint au plus tard lors de leur sortie. La créance fiscale devient exigible au plus tard au moment de la sortie de Suisse (cf. art 12 LRPL). Ainsi et en d’autres termes, l’obligation fiscale dure aussi longtemps que les véhicules suisses sont admis à la circulation et parcourent des routes soumises à la redevance. Le véhicule étranger est assujetti tant qu’il emprunte des routes ouvertes au trafic public soumises à la redevance (Message du Conseil fédéral du 11 septembre 1996 relatif à une loi fédérale concernant la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations, FF 1996 V 505, spéc. 532).

2.5 Concernant la période fiscale, l’art. 13 LRPL prévoit que la redevance est perçue au moins une fois par année. Cet article est complété par l’art. 24 ORPL qui précise que :

  1. La période fiscale est le mois civil.
  2. Si un véhicule est mis en circulation dans le courant du mois, la période fiscale se termine à la fin du mois.
  3. Lors du retrait du véhicule de la circulation, la période fiscale se termine le jour de l’annulation du permis de circulation.

2.6 L’assujetti est tenu de collaborer à l’établissement du kilométrage (art. 11 LRPL, art. 21 ORPL). La personne assujettie à la redevance doit fournir à l’AFD les indications nécessaires au calcul de la redevance dans les vingt jours suivant l’expiration de la période fiscale (art. 22 al. 1 ORPL). La période fiscale est le mois civil (art. 24 al. 1 ORPL) et la redevance est perçue au moins une fois par année (art. 13 LRPL). La redevance est déterminée sur la base de la déclaration électronique ou écrite remise par la personne assujettie à la redevance (art. 23 al. 1 ORPL) (cf. arrêts du TAF A-3274/2017 du 14 février 2018 consid. 3.6 et A-2644/2015 du 8 janvier 2018 consid. 3.8).

2.7 Concernant le recouvrement de la redevance, l’art. 25 ORPL prévoit que :

  1. L’AFD envoie une décision de taxation sur papier ou par voie électronique à la personne assujettie à la redevance.
  2. La redevance devient exigible 60 jours après la fin de la période fiscale.
  3. Le montant de redevance fixé doit être payé dans un délai de 30 jours à compter de l’établissement de la décision de taxation. Si ce délai n’est pas observé, le montant impayé est passible d’intérêts.
  4. Le DFF fixe les taux d’intérêt.
  5. Il détermine en outre :
    1. les cas dans lesquels aucun intérêt moratoire n’est perçu ;
    2. le montant maximum en-deçà duquel les intérêts moratoires et rémunératoires minimes ne sont ni perçus ni dus.

Ainsi, en raison système de perception de la redevance prévu par l’ORPL, il existe un décalage entre la prestation kilométrique établie (périodes fiscales) et l’envoi des factures pour lesdites périodes fiscales.

3. En l’espèce, il s’agit de déterminer si c’est à bon droit que l’autorité inférieure a considéré que la recourante était solidairement responsable du paiement de la RPLP due par l’assujettie pour les périodes fiscales allant d’août à octobre 2016. A cet égard, la recourante estime que dans la mesure où elle n’était plus propriétaire des véhicules au moment de l’envoi des décisions de taxation à l’assujettie, respectivement de la mise en demeure de cette dernière, elle ne saurait être tenue solidairement responsable du paiement de la redevance.

3.1 Certes, le dossier révèle que la recourante aurait, en date du 8 novembre 2016, conclu un contrat portant, entre autres, sur la vente de véhicules tracteurs, de remorques et de semi-remorques avec un tiers (acheteur) dont l’identité a été caviardée. L’extrait du contrat fourni par la recourante permet également de constater que par cet acte, l’acheteur aurait conclu avec une personne dont le nom ou raison sociale a également été caviardé un contrat de cession de clientèle aux termes duquel, cette personne cèderait à l’acheteur sa clientèle et lui transfèrerait ses collaborateurs. Le contrat de cession de clientèle aurait pris effet au 1er janvier 2017. Certes encore, l’intégralité des décisions de taxation relatives à la RPLP dont il est question ici ainsi que les mises en demeure relatives à l’absence de paiement de dite RPLP ont toutes été adressées à l’assujettie postérieurement au 8 novembre 2016. A cet égard, il convient d’observer ce qui suit.

Premièrement, sur la base de l’extrait, extrêmement sommaire, du contrat produit par la recourante, il est impossible de déterminer l’identité des parties au contrat de cession de clientèle. Ensuite, bien qu’il apparaisse que le contrat de cession de clientèle ait pris effet au 1er janvier 2017, il est impossible de déterminer la date à laquelle le contrat de vente des véhicules a pris effet. Toutefois, le Tribunal de céans estime qu’au vu des considérations qui suivront et du fait que les périodes fiscales litigieuses sont antérieures à cette date, il n’y a pas lieu d’investiguer plus avant la question de savoir si, au 8 novembre 2016, la recourante était encore propriétaire des véhicules lourds dont il est question ici. Cette question peut ainsi souffrir de demeurer ouverte.

3.2 Sont en effet ici litigieuses les factures RPLP reprises sur la décision querellée concernant la prestation kilométrique établie par les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie durant les périodes fiscales allant du 1er août au 31 octobre 2016. A cet égard, il convient d’observer ce qui suit.

Premièrement, la Cour rappelle ici que la période fiscale est le mois civil et que, lors du retrait du véhicule de la circulation, la période fiscale se termine le jour de l’annulation du permis de circulation (cf. art. 24 ORPL et consid. 2.4 et 2.5 ci-avant). Ensuite, aux termes de l’art. 25 al. 2 ORPL, la redevance devient exigible 60 jours après la fin de la période fiscale (cf. art. 25 al. 2 ORPL et consid. 2.7 ci-avant). Ainsi, c’est à juste titre que l’autorité inférieure rappelle dans son mémoire de réponse du 26 juin 2017, qu’il existe, en raison du système de perception prévu par l’ORPL, un décalage temporel entre la période fiscale et l’envoi des décisions de taxation (et donc des factures d’impôt) relatives à dite période fiscale. Il ne saurait en effet en être autrement, étant donné que la redevance est déterminée au moyen d’un dispositif de mesure électronique (cf. art. 15 al. 1 ORPL) et qu’il appartient à la personne assujettie à la redevance de fournir à l’AFD les indications nécessaires au calcul de la redevance dans les 20 jours qui suivent l’expiration de la période fiscale (cf. art. 22 al. 1 ORPL et con-sid. 2.6 ci-avant).

Le Tribunal rappellera encore qu’en vertu de l’art. 5 LRPL, l’assujetti est, en principe, le détenteur du véhicule. Cela dit, l’art. 36 al. 1bis prévoit que lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu’il a été mis en demeure sans effet, le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d’un véhicule tracteur et/ou d’une remorque est, sous réserve des art. 36a et 36b ORPL, solidairement responsable de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations et des intérêts et émoluments éventuels, compte tenu du poids total du véhicule tracteur et/ou de la remorque pour les kilomètres parcourus avec ce dernier, respectivement par cette dernière (cf. consid. 2.2 ci-avant). S’agissant de la réserve relative aux articles 36a et b ORPL (cf. consid. 2.3 ci-avant), il ressort du dossier qu’aucune demande n’a été faite en ce sens à la DGD lors de la conclusion du contrat de location entre l’assujettie et la recourante.

3.3 En l’occurrence, il ressort clairement du dossier que l’autorité inférieure a établi, entre le 25 novembre 2016 et le 3 janvier 2017, les factures RPLP relatives aux périodes fiscales allant du 1er août au 31 octobre 2016 pour les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie. Après échéance desdites factures, un rappel de paiement a été adressé à cette dernière. Les factures étant restées impayées, la DGD demanda au Service cantonal des automobiles de retirer les permis de circulation et les plaques de contrôle des véhicules dont il est question ici. Elle introduisit en parallèle une procédure de poursuite contre l’assujettie. Force est donc ici de constater que, dans la présente cause, le détenteur des véhicules a bel et bien été mis en demeure sans effet.

L’argument de la recourante selon lequel la solidarité du propriétaire du véhicule n’apparaîtrait qu’au moment où le détenteur du véhicule, débiteur principal de la redevance, devient insolvable ne trouve par ailleurs aucun ancrage dans le texte légal. La qualité de débiteur solidaire naît en effet en même temps que celle du débiteur principal (cf. supra consid. 2.2) et ne saurait donc varier en fonction de la solvabilité de celui-ci. Au final, il ne saurait donc être admis, comme l’estime la recourante, que l’art. 36 al. 1bis ORPL concerne uniquement les personnes étant propriétaires, loueurs ou donneurs de leasing d’un véhicule tracteur ou d’une remorque « au moment où le détenteur » dudit véhicule ou de dite remorque apparaît être insolvable ou est mis en demeure sans effet.

Le dossier révèle également que durant les périodes fiscales faisant l’objet de la présente procédure, la recourante était propriétaire des véhicules immatriculés au nom de l’assujettie. Il sera rappelé ici que, s’agissant de véhicules suisses, l’obligation fiscale naît le jour de l’admission du véhicule à la circulation et que celle-ci s’éteint le jour où les plaques d’immatriculation sont restituées ou le permis de circulation annulé (cf. consid. 2.4 ci-avant). Or, selon les données transmises par le Service cantonal des automobiles, les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie ont été mis hors circulation entre le 2 et le 9 janvier 2017 (cf. Annexe 13 à la réponse).

Contrairement à ce que la recourante semble penser, ce n’est pas tant la date de facturation de la RPLP que la période fiscale durant laquelle une personne était propriétaire, loueur ou donneur de leasing d’un véhicule tracteur et/ou d’une remorque qui est déterminant ici. La recourante confond en effet la naissance de la créance fiscale et son exigibilité. La créance d’impôt naît sitôt que les faits générateurs prévus par la loi sont réalisés. La créance fiscale prend naissance ex lege, sans aucune autre intervention extérieure. La taxation n’a aucun effet constitutif, elle n’est pas une condition de l’existence de la créance d’impôt (ATF 107 Ib 376 consid. 3 p. 378 et les références citées). L’existence et le contenu de la créance fiscale sont fixés par la loi, raison pour laquelle dite créance est en principe irrévocable : dès l’instant où une créance fiscale est née, elle ne peut être réduite à néant par une opération destinée à effacer les faits générateurs lui ayant donné naissance (arrêt du TF 2C_692/2013 du 24 mars 2014 consid. 4.2 in Archives 82 740 et les références citées). Par conséquent, la fin de l’assujettissement à la RPLP, soit (cf. supra consid. 2.4.) le jour où les plaques d’immatriculation sont restituées ou le permis de circulation annulé, ne saurait éteindre des créances fiscales nées antérieurement, quand bien même elles n’auraient pas encore été constatées par une décision administrative.

Il s’ensuit donc que c’est à juste titre que l’autorité inférieure considère, dans la décision querellée, que la recourante doit être tenue solidairement responsable du paiement de la redevance facturée pour la prestation kilométrique effectuée durant la période où elle était propriétaire et loueur des véhicules immatriculés au nom de l’assujettie.

[…]

(Rejet du recours, pour autant que recevable).